Tianjin, complètement à l'est

Tianjin sera notre point le plus à l'est. Le plus loin de chez nous. Le titre du blog Moscou-Pékin-Istanbul, avait été choisi car Pékin devait l'être, ce point le plus à l'est, le point à partir duquel notre retour débuterait, le point à partir duquel nous inverserions notre marche d'ouest en est en marche d'est en ouest. Ça tombait bien aussi car Pékin est assez connue, tout le monde voit bien où c'est depuis les Jeux Olympiques. Si on avait su que l'on irait à Tianjin, on aurait quand même laissé Pékin dans le titre, estimant que Tianjin aurait été un peu trop confidentiel, même pour un prof de Géo. Mais, comme les pluies diluviennes qui se sont abattues sur l'est de la Chine ont retardé notre départ de Pékin, pif paf pof qu'est ce qu'on fait, opportunistes que nous sommes, une petite escapade à Tianjin, pour la journée. C'est vite fait, ça coûte pas cher, ça fait plaisir à la famille et ça permet de s'évader un peu de Pékin, de sa foule et de sa foule de touristes (dont nous faisons partie), qui apparemment ne comprennent pas ce que l'on est allé foutre à Tianjin, puisqu'ils n'étaient pas là.

Tianjin est une ville au statut particulier, ancien comptoir des grandes puissances et aujourd'hui municipalité autonome, quatrième ou sixième ville de Chine suivant les classements, ville de verre, ville de pierres, ville des banques, mais aussi ville d'histoire.

On arrive à Tianjin par un train à grande vitesse, le train qui fait la fierté des chinois, le CRH, avec son museau bien profilé et tout blanc qui ramasse tout un tas d'insectes à chaque trajet. Le réseau à grande vitesse chinois est devenu en 20 ans le plus grand du monde, concentrant à lui seul plus de la moitié des voies de ce type. Le Tours-Bordeaux, en Chine, ça ferait longtemps qu'il aurait été là. Pourtant, de tout notre voyage en Chine, seule cette navette pour Tianjin sera à grande vitesse. Nos autres parcours se feront à l'ancienne, mais nous aurons le temps d'en reparler, et ce dès le prochain article. Pour l'instant, après 30 minutes à 265 km/h, on est juste sur le parvis de la gare de Tianjin, et nos nuques ne vont pas tarder à se plier pour nous faire regarder vers le ciel.

Tianjin est située à 120 kilomètres de Pékin, au sud-est, et possède une façade sur la Mer Jaune qui se referme contre le nord est de la Chine, c'est-à-dire le Golfe de Bohai. Son quartier central est développé de part et d'autre d'une rivière enjambée par des ponts, notamment celui de la libération, la libération en 1937 de l'ennemi nippon qui avait pris le contrôle de la ville et des concessions.

Tianjin est donc une ville qui a vu de nombreuses concessions étrangères (jusqu'à vingt concessions, dont une française), se créer le long de la rivière, à la suite de la subtile seconde guerre de l'opium où l'on a fait signer ce qu'on voulait à la Chine lors de sa capitulation. Des architectes de chaque pays concessionnaire sont venus et ont bâti chacun dans le style de leur pays d'origine. Les bâtisses de pierres sont ainsi victoriennes, haussmanniennes, viennoises, wallstreetiennes. Aujourd'hui on y fait toujours de l'activité bancaire, si bien qu'on a l'impression de se trimbaler dans une rue de Genève, où des gens bien habillés et pressant le pas, rentrent dans des grands halls bien gardés, des grands halls version XIX^e siècle, qui doivent savoir bien garder les secrets. Quelques églises ne sont pas en reste, niveau conservation et conservation des secrets. Autour, les buildings poussent encore.

Après, très honnêtement, une fois avoir descendu la rue avec les anciens bâtiments phares des concessions, après avoir trouvé quelques plaques avec les mentions 法国(Fa Guo, France), il n'y a plus grand chose à voir. C'est vite fait le centre de Tianjin. On peut toujours se balader des heures, c'est grand, il n'y a pas de problème de ce côté là, mais sous quarante degrés, c'est encore plus vite fait de vouloir rester à l'ombre, sous les arcades aux terrasses ventilées. On a essayé de jouer le jeu quand même, en allant jusqu'à pousser dans une rue commerçante. Mais c'était davantage pour profiter de la clim des malls, des magasins de fringues ou de téléphones qui refroidissent jusqu'à 10 mètres devant leurs portes ouvertes. On a fait un petit plongeon dans la piscine à boules olympique de Tianjin, et on a poussé jusqu'au bord de la rivière mais celle-ci n'apportait aucun frais.

Malgré tout Tianjin était une escapade intéressante, qui nous a fait changer un peu d'air la journée, et qui nous a fait rouvrir quelques livres d'histoire dans laquelle les grandes puissances de l'époque ont eu un rôle pas toujours joli. Le soir c'était retour à la maison, dans notre quartier de hutongs pékinois, où les habitudes commençaient à se dessiner clairement. Nous étions satisfaits d'avoir quitté notre ville d'adoption le jour et de la retrouver le soir.